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Allaitement et retour au travail - Perinat92
après accouchement

Allaitement et retour au travail

Au retour de leur congé maternité, vos collaboratrices qui font le choix de prolonger leur allaitement maternel peuvent se retrouver confrontées à une question délicate : comment concilier l’allaitement maternel avec les exigences de leur emploi ?

À ce jour ⅓ des femmes allaitantes poursuivent l’allaitement maternel en travaillant. En tant qu’employeur, votre rôle est de vous préoccuper de cette question[1] afin d’accompagner vos collaboratrices et ne pas les laisser seule dans cette situation.

Pourquoi allaiter ?

L’allaitement exclusif est recommandé jusqu’aux 6 mois du bébé, puis en complément d’autres aliments jusqu’à 2 ans voire au-delà. Les instances internationales (OMS) comme françaises (HAS) reprennent ces recommandations.

Récemment, la commission des 1000 premiers jours, qui s’intéresse aux facteurs permettant une bonne santé sur toute la vie, mentionne les bienfaits de l’allaitement sur la santé du bébé et sa mère.

  1. Impact sociétal et environnemental

L’allaitement maternel est pratique, car il élimine la nécessité de préparer et de nettoyer des biberons. De plus, il est économique, car il évite les coûts associés à l’achat de lait artificiel.

L’allaitement maternel est écologiquement responsable, ne générant aucun déchet lié à la production et à l’utilisation de lait artificiel.

  1. Alimentation optimale 

Le lait maternel est la source d’alimentation la plus adaptée aux besoins nutritionnels du jeune bébé. Il contient les nutriments essentiels et les anticorps nécessaires pour renforcer le système immunitaire du bébé, le protégeant ainsi contre les infections et les maladies. Réduisant entre autres le risque de :

–  infection ORL, ainsi les risques de coliques, problèmes gastro-intestinaux.

–  obésité pendant l’enfance et l’adolescence et diabète à l’âge adulte.

– maladies chroniques telles que l’asthme et les allergies

Il existe un effet dose de l’allaitement, plus il se prolonge, plus les effets bénéfiques du lait maternel sont importants.

  1. Avantages pour la mère

L’allaitement maternel favorise la diminution du risque de dépression du post partum, du risque de cancer du sein ou de l’ovaire, du risque d’ostéoporose, du diabète et des pathologies cardio-vasculaires.

  1. Le lien d’attachement

L’allaitement maternel établit un lien émotionnel puissant entre la mère et le bébé. Le contact peau à peau, le regard échangé, et le sentiment de proximité renforcent les liens d’attachement, essentiel lors de la séparation maternelle à la reprise du travail.

Pourquoi accompagner ?

Le retour au travail pour une mère qui allaite peut-être une période de transition complexe, c’est souvent une des raisons majeures de l’arrêt de l’allaitement. Il est essentiel de reconnaître l’importance d’accompagner et de soutenir ces femmes dans cette étape cruciale de leur vie.

Cette situation comporte de nombreux avantages, à la fois pour la collaboratrice et pour l’entreprise :

  1. Avantages pour la collaboratrice
  • Bien-être et sérénité : En soutenant l’allaitement maternel, l’employeur contribue au bien-être de la collaboratrice[2] en lui permettant de maintenir un lien émotionnel fort avec son enfant, ce qui peut réduire le stress lié à la séparation
  • Réduction de l’absentéisme[3] : Les enfants allaités sont souvent en meilleure santé, ce qui peut signifier moins de jours d’absence pour les parents dus à des problèmes de santé de leur enfant.
  • Productivité accrue : Les collaboratrices qui se sentent soutenues dans leur rôle de mère sont généralement plus satisfaites et engagées au travail, ce qui peut se traduire par une meilleure productivité.
  1. Avantages pour l’entreprise :
  • Diminution du taux de rotation[4] : L’entreprise peut fidéliser davantage ses collaboratrices en créant un environnement de travail favorable à la conciliation entre la vie professionnelle et la vie familiale.
  • Image de marque positive : Les entreprises qui soutiennent activement l’allaitement maternel gagnent en réputation, montrant ainsi leur engagement envers le bien-être de leurs employés et de leur communauté.
  • Participation à la démarche RSE: Le soutien de la poursuite de l’allaitement rentre dans plusieurs des 17 objectifs développement durable à mettre en place pour 2030 (nutrition : 2, mortalité infantile et risque de maladie non transmissible : 3, développement cognitif et éducation : 4, voire 11 et 12).
  • Respect des lois et réglementations : De nombreuses lois et réglementations protègent le droit des femmes à allaiter au travail. En les respectant, l’entreprise évite des litiges potentiels et démontre son engagement envers l’égalité des droits.
  • Réduction des coûts de santé[5] : Les enfants allaités ont tendance à être en meilleure santé, ce qui peut contribuer à la réduction des coûts liés aux soins de santé pour la collaboratrice et sa famille.

Comment les employeurs peuvent soutenir les collaboratrices qui allaitent ?

La majorité des aménagements proposés sont simples et peu coûteux à mettre en place :

1. Aménager un espace de lactation

Mettre à disposition un lieu approprié et privé pour l’expression du lait maternel est essentiel pour que la collaboratrice puisse continuer à allaiter en toute tranquillité. La salle doit être facilement accessible. Si l’employeur n’a pas la possibilité de proposer une salle, un paravent peut être utile. Une prise électrique permettra de brancher un tire-lait et un réfrigérateur de conserver le lait tiré en journée, transporté ensuite dans une glacière.

2. Proposer des horaires flexibles

Proposer des horaires flexibles ou la possibilité de travailler à distance peut aider les mères à gérer leur emploi du temps en fonction des besoins de leur bébé.

3. Encourager et favoriser la communication

Les employeurs peuvent encourager les collaboratrices à communiquer ouvertement leurs besoins et leurs préoccupations, créant ainsi un climat de confiance. De leur côté, les employeurs sont invités à informer les femmes sur les aménagements prévus dans l’entreprise dès l’annonce de leur grossesse.

4. Sensibiliser et former

Organiser des sessions de sensibilisation sur l’allaitement maternel peut aider les collègues à comprendre les défis et les besoins des mères qui allaitent. Favoriser les attitudes positives envers la mère, la bienveillance, et ne pas accepter des comportements inverses (ex : hurler “meuh” à une femme qui traverse l’open space avec son tire lait)

La formation peut également s’adresser aux managers pour les informer des droits et besoins de leurs salariées, pour qu’elles se sentent soutenues et encouragées dans leur démarche, et ce dès l’annonce de la grossesse

Concrètement, vous pouvez vous faire accompagner par des spécialistes de la lactation et du conseil aux entreprises. Contactez le réseau PERINAT92 pour une mise en relation.

Ce que dit la loi

Actuellement en France, les lois concernant l’allaitement maternel au travail sont conçues pour soutenir et protéger les mères qui souhaitent allaiter leurs bébés tout en continuant à travailler. Celles-ci ont été créées en 1917, ont été revues en 2007 et sont en application depuis 2008. 

Voici les principaux points de la législation française concernant l’allaitement maternel au travail (articles L2225-30 à 33, R1225 5 à 7, L1142-3, R4138-4, R4152-13 à 28 du Code du travail[6] ) :

1.Temps d’allaitement et aménagement des horaires de travail

« Pendant une année à compter du jour de la naissance, la salariée allaitant son enfant dispose à cet effet d’une heure par jour durant les heures de travail ». Il en est de même pour les salariés du secteur privé et public depuis l’Article 44 Loi n° 2019-828 du 6 août 2019. Ce temps d’allaitement remplaçant une heure de travail permet d’allaiter ou d’exprimer le lait directement sur le lieu de travail. En effet, « La salariée peut allaiter son enfant dans l’établissement ». La convention collective de l’entreprise peut prévoir de rémunérer cette heure, la loi ne faisant pas mention du sujet de la rémunération.

« L'heure (...) est répartie en deux périodes de trente minutes, l'une pendant le travail du matin, l'autre pendant l'après-midi. La période où le travail est arrêté pour l'allaitement est déterminée par accord entre la salariée et l'employeur. À défaut d'accord, cette période est placée au milieu de chaque demi-journée de travail. »

La période de trente minutes peut être réduite à vingt minutes lorsqu’il existe un local dédié à l’allaitement à proximité directe du lieu de travail de la collaboratrice.

La durée et la fréquence de ces pauses peuvent varier en fonction des besoins individuels

2. Création d’un espace de lactation

La loi prévoit des dispositions qui ne sont pas forcément adaptées à toutes les réalités de terrains. Le soutien de l’équipe est prépondérant par rapport à un local idéal.  

L’employeur de plus de 100 salariées est tenu de fournir un espace approprié et privé pour que la mère puisse allaiter son enfant ou exprimer son lait. Pour les employeurs de plus petites entreprises, la loi n’impose rien de particulier mais des aménagements simples sont les bienvenus (cf chapitre 3). 

En effet, « Tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d’installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement » ; « Le local dédié à l’allaitement (…) est : 

1° Séparé de tout local de travail ; 
2° Aéré et muni de fenêtres ou autres ouvrants à châssis mobiles donnant directement sur l'extérieur ; 
3° Pourvu d'un mode de renouvellement d'air continu ; 
4° Convenablement éclairé ; 
5° Pourvu d'eau en quantité suffisante ou à proximité d'un lavabo ; 
6° Pourvu de sièges convenables pour l'allaitement ; 
7° Tenu en état constant de propreté. Le nettoyage est quotidien et réalisé hors de la présence des enfants ; 
8° Maintenu à une température convenable dans les conditions hygiéniques. » 

Afin d’y assurer des conditions d’hygiène optimales, il est nécessaire d’y trouver un réfrigérateur dédié au stockage du lait maternel. Cet espace ne peut pas être une toilette.

3.Interdiction de discrimination

Les employeurs sont tenus de ne pas discriminer les femmes qui allaitent au travail. Cela signifie qu’une mère ne peut pas être licenciée ou pénalisée en raison de son choix d’allaiter. La posture de l’employeur et des collègues est moteur au soutien de l’allaitement.

L’employeur est tenu de respecter ces dispositions et de veiller à ce que les droits des mères qui allaitent soient respectés sur le lieu de travail.

 

[1] Breastfeeding duration, social and occupational characteristics of mothers in the French ‘EDEN mother-child’ cohort. Matern child health, 2013 (France) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22729659/

[2]Breastfeeding Support in the Workplace: The Relationships Among Breastfeeding Support, Work-Life Balance, and Job Satisfaction. J human lact, 2018 (USA) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28609215/

[3]COHEN 1995

[4]GALTRY 1997, LYNESS 1999, ORTIZ 2004

[5]BARTICK 2010

[6] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000018532781#:~:text=Aucun%20enfant%20atteint%20ou%20paraissant,contre%20tout%20risque%20de%20contamination

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